27 avril 2012

 

ai (8)


ai vu Théo Lessour sur "scène" dans un affreux bouge berlinois cependant assez parfait pour ce genre de situation. Une soixantaine de personnes l'ont écouté avec semble-t-il pas mal d'intérêt. Pas mal de livres se sont vendus (et même signés) et le débat qui a suivi avec deux autorités culturelles insideuses de Berlin, l'une musicienne culte et l'autre programmatrice de lieux prestigieux, deux femmes puissantes comme on dit de nos jours, a été très intéressant. Il semblerait que le Théo ai été adopté par susdites autorités qu'on pourrait qualifier de légitimantes.  Il est peut-être bien parti ce livre.
ai lu Kertész, Le drapeau anglais. Ai lu une partie du Livre de la Jamaïque de Russel Banks (une partie seulement. Quelqu'un au Kaffee Burger, le bouge où l'on assistait à la présentation de Berlin Sampler, m'a piqué ce putain de livre de la Jamaïque, il  faudrait ne jamais sortir de chez soi). L'Europe et l'Amérique, fight !  Kertész écrit un peu comme Thomas Berhnardt, comme un obsédé de la phrase, un obsédé de l'intelligence, mais peut être avec plus de subtilité, plus de légèreté que l'autrichien (cela ne vaut pas jugement de valeur, je crois d'ailleurs que je préfère l'autrichien). Il est de toute façon clair en quelques lignes qu'on a affaire à un grand. Une écriture faite d'entrelacs de constants changement de point de vue, de millions de références de haute volée, et d'un humour dépressif (ça me rappelle un peu parfois Zinoviev, pour la dénonciation par l'absurde d'un régime totalitaire, ici la Hongrie).  Russel Banks est venu juste après, hasard du calendrier dirait Thierry Roland, et ce fut un très beau choc. Après la langue sophistiquée, la mélancolie européenne et ses détours infinis en elle même, ses replis, venaient les mots directs et sans fioritures, cette recherche d'une langue plate qui se cacherait le plus possible derrière ce qu'elle a à dire. Le livre de Jamaïque est l'histoire d'un homme parti à la recherche de l'Autre absolu  (un blanc américain fait un travail universitaire sur les descendants des nègres marrons jamaïcains) et un constat de l'impossibilité de véritablement le rencontrer. Le narrateur passe son temps à manquer ce qu'il cherche. A réaliser l'impossibilité de l'empathie, passée la litanie des bons sentiments. C'est un livre d'une grande amertume qui pourtant ne charrie dans sa langue aucune tristesse particulière. J'avais oublié l'Amérique. J'avais oublié comme Russel Banks est un putain d'écrivain, qui fait son chemin sans se la raconter.  A côté de lui les monuments surcôtés comme Philip Roth (et je soupçonne aussi Franzen, mais je ne l'ai pas encore lu) sont, en vérité je vous le dit, de petits poucets, des starlettes à boa rose, des branleurs, des pros du mots,  des super techniciens, des re-lous.
Ai vu Drive, le film des années 2010.  Déçu. Sublime image, personnage attachant, actrice jolie comme un coeur. Bon mais et alors ? Pour une fois j'aurai aimé qu'on m'épargne la moitié mafia du film et qu'on me donne de la romance nouvelle vague au goût de camboui, ça m'aurait suffi. Même la musique de Cliff Martinez dont j'avais adoré la BO du Solaris de Soderbergh, m'a laissé un poil de glace. Mais les morceaux venus de la scène pop font clairement du bel effet. Le track insupportablement ennuyeux et pourtant merveilleusement collant des Chromatics est dans son genre hallucinant, 15 minutes avec une malheureuse pattern de synthé et une simpliste boîte à rythme et un drone d'orgue qui ne s'arrête jamais... il illustre magnifiquement les 10 premières minutes du film. Avoir utilisé comme bande son cette recherche de beauté à travers ou par l'ennui est d'un certain courage, clairement.
Ai pondu quatre morceaux recollés en un à partir de diverses sessions  des derniers mois, inclus celle avec A, déjà mentionnée. Comme d'habitude je rencontre une certaine incompréhension de mes concitoyens, et même de ma vocaliste. trop long ! Pourtant ils se dissolvent tout comme il faut à mon goût ces petits tracks... au bout du compte, ce sont  les passages les plus "solides" qui me posent encore quelques problèmes… anyhow, On peut les écouter (oui c'est moi qui "joue" les "guitares"). Work in progress, tout ça.
Ai écouté l'album de Actress qui m'a paru très bon et même que je vais l'acheter chez Hardwax dès que j'ai une minute.

20 avril 2012

 

Berlin Sampler in english


Et voilà. 2000 livres de plus sur les bras (avoir la photo du stock est assez rare, sauf quand on fait une sortie en mode archi-indépendant. Ceci est une sortie en mode archi-indépendant). Avec une légère erreur de la couleur de couv devenue quasi noire. Ce qu'on appelle un Happy accident, l'objet est devenu plus euh glamour dirons-nous. Le choix d'un vernis brillant améliore pas mal les choses. La première vente a eu lieu dès la mise en place par Exberliner de la shop. En Floride (la vente, pas la shop). 150 personnes se seraient inscrites à la soirée de lancement et Théo commence à flipper sa reum comme on disait chez nous dans ma jeunesse.
PS : j'oubliai, le site web, parce que il faut bien que google le voit un jour : http://www.berlin-sampler.com

18 avril 2012

 

ai (7)


ai toujours pas été à l'expo de Richter, mais je suis par hasard tombé sur cette peinture (Schädel, 1983). Oh notre comité des affaires esthétiques en apprécie grandement le minimalisme-grotesque, le gothique Bauhaus, aussi beau et puissant et sanglant et comique à la fois qu'un Pierrot Lunaire de Schönberg (qui décidément ne nous lâche plus).
ai acceuilli W. un autre ami d'à peu près vingt ans qui voulait clubber dans la ville au printemps froid. W est resté dix jours. Avons un peu clubbé, mais tout de même c'est plus de notre age cette lascivité de tous ces corps qui se frottent sur des musiques sensuelles, nous sommes passés à autre chose, nous avons grandi, évidemment, nous ne nous laissons plus impressionner par des lumières basses et des basses lumineuses et des sourires un peu artificiellement supportés de si-reines de la nuit embarquées dans leurs lestes odyssées personnelles au sein de la masse mouvante, ah ça non, rien de ces intenses regards qui traversent la foule ni de ces lèvres qui se trouvent un peu au hasard ne nous impressionne maintenant, nous avons grandi, nous préférons lire des livres, nous préférons discuter esthétique ou politique, W. et JB seraient d'accord, we are reasonable people (justement).
ai enregistré une petite session vocale parlée fortement vinifiée avec une amie actrice, A., session dont nous espérons pouvoir tirer quelque chose de décent une fois mixée, il faut se dépêcher, le temps pourrait bientôt changer et alors nous n'aurons plus une minute à nous, la capitale mondiale des camps de vacances pour adultes ouvrira alors ses portes, et plus rien de productif ne pourra y être achevé, c'est une obligation légale ici, de ne rien achever d'autre que soi-même une fois le thermomètre au-dessus des vingt degrés
ai vu sur le site de cette expo "animisme et modernité" cet hallucinant document (78 megs, plut-ôt à télécharger, et prévoir une bonne demi heure pour le regarder au calme) qui retrace les errements de l'occident dans son rapport au vivant, et d'ailleurs au monde en général. Extrêmement vivement conseillé. J'attends beaucoup de l'expo d'après la petite vidéo de présentation que j'ai pu en voir. L'animisme défini comme la subjectivisation du monde, sa re-subjectivisation après des siècle d'objectivisation. Donner de l'esprit aux choses. L'animisme à travers la technologie notemment. La vision asiatique et la vision européenne de la machine. Et les vieux chamanes vs ce grand dadet de Descartes. Une relation différente au vivant. Ce sont des questions qui justement apparaîssent comme d'elles mêmes dans mes recherches sur la musique. Quand Lee Perry macule ses bandes de boue ou souffle la fumée de son spliff dans la tranche de la console, quand il creuse une marre pour accueillir des canards dans sa cabine de batterie, il vise à ce que Deleuze appelle le point où s'estompe la différence entre la nature et l'artifice... il ne le vise pas d'ailleurs, il est en plein dedans (en plus de dedans la ganja), mais il vise plus, il veut faire entrer mother earth dasn sa musique, et sa musique dans mother earth. Lee Perry a fini par laisser la pluie rentrer dans le studio, la mousse, les plantes vertes, la boue, les animaux, puis il s'est décidé à y foutre le feu. C'est un truc à manier avec précaution l'animisme (et la ganja).

12 avril 2012

 

Rakish, clever and slightly wavering

Rakish, clever and slightly wavering. C'est comme ça qu'une journaliste de Exberliner a décrit Théo Lessour, "figure of an archetypal young french intellectual" (elle a même casé la Sorbonne dans sa description), Rakish, clever and slightly wavering. Je traduis rapido depuis les outils du web : Je m'en-foutiste, intelligent et un tantinet indécis (irrésolu). Rakish, clever and slightly wavering.

02 avril 2012

 

ai(6)

ai passé quelques jours à Rennes chez C et JD et leurs enfants (et leurs chats) (et leurs tritons). C, l'amie de 22 ans… Y ai rencontré un poète rennais venu assister à la répétition en public restreint d'une conférence que Théo Lessour devait donner quelques jours plus tard à Nantes. Le dit poète m'a branché entre moult choses sur Saint-pol Roux. Saint-Pol Roux poète dont la mort tragique - un SS tire sur sa fille et brûle tous ses manuscrits pendant la débacle de juin 40, il ne s'en relève pas, il meurt quelques semaines plus tard d'épuisement - éclipse un peu l'oeuvre plus ou moins oubliée. Double peine.

(Y) ai aussi vu un concert dans un squat avec un saxophoniste en souffle continu qui sonnait comme du philip glass sous acide (du Terry Riley qui aurait choppé une chtouille free jazz). Les muscles de Guillaume Bellanger étaient gonfflés comme ses poumons. Corps en tension, en dépense. une de mes plus belles aventures free depuis Le Quan Ninh l'année dernière. Cascade de salive depuis le pavillon de cuivre. Merveille d'hallucinante musique déchirée où l'on ne savait plus très bien qui du corps ou de l'instrument usait l'autre. Un squatt plein de chiens et de déviationistes capilaires. Et de sculptures robotico-oniriques en gros métal mal dépoli. Des seiches d'acier. Des Robotcop rouillés, des statues-véhicules. Le stade Mad-max de la culture alternative. M'a rappelé certaines germanités punk originelles. Rennes est d'ailleurs un repaire de punks à chien et de freepartistes divers. Ils squattent les trottoirs de la ville et affichent leur dédain crasseux de la "vraie vie" en Gammlers / Beatnicks du vingt et unième siècle.

ai parcouru le numéro "Poney" de la revue Enculer tenue par l'activiste rennais LLdeMars avec qui j'avais déjà eu à faire dans une autre vie, vers 1999. Enculer (Poney) a-t-elle plus que son nom ? J'aurai aimé avoir un peu de temps pour le savoir… elle a en tout cas comme des réminiscences des grandes heures Dada et acéphales et Suréalisme au service de la révolution.

ai écouté lors de notre escapade dominicale vers Saint-Malo, l'hallucinant deuxieme album de Winter Family. Magnifique voix décavée qui marmonne sur des fonds luxuriants d'harmoniums et de field recordings. Simplicité des structures linéaires et textures aussi infinies que des motifs d'enluminures. Ce genre de disque qui vous rend jaloux et heureux à la fois, d'autant que j'ai porté mes recherches musicales personnelles des dernières semaines exactement dans cette direction. Comme si ils avaient achevé ce que j'ai commencé avant même que je n'ai pris le temps de m'y mettre.

ai squatté deux soirées chez Alexd, l'ami de 14 ans qui part habiter là-bas et squatte en attendant que sa famille ne le rejoigne un appartement plein de vieilleries abandonnées. Casserolles de cuivre, papiers peints hors d'age avec des jolies fleurs, verre dépoli, vieux éviers, énormes armoires normandes… Odeurs de campagne, odeurs des années d'après guerre, odeurs des grands parents et des grands-cousins oubliés (O Alter Duft…).

ai vu Nantes, où Théo a donné deux interviews, une table ronde à la radio et une "conférence" ("séance d'écoute commentée" serait plus proche de la réalité). Théo n'a pas trop tremblé devant la petite foule, pleine de lycéens curieux et polis plutôt qu'enthousiastes. Les gens ont écouté sagement. ai surtout remarqué le soupir de soulagement, le ouf de sidération quasi douloureuse du public unanime après la diffusion du Tanz Debil de Neubauten, qui reste trente ans après un must de destruction des esgourdes.

ai aimé Nantes, Trentemoult, son Navibus et sa chaleur de juin. Avons vu au concert du vendredi Oval qui était mauvais-affligeant et Robert Lipock qui était très bon. Ai passé du bon temps avec Mathias, sa meuf et ses deux bambins. Mathias D. a sorti son premier album en même temps que moi le mien, il y a onze ans. Il est depuis devenu un musicien professionnel pendant que j'errais de ci et de là. Nous avons tous les deux de belles connections intellectuelles/artistiques qui se transforment en amitié.

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