15 septembre 2007
Earth - Hibernaculum
C'est mon disque de chevet, de travail et de vaisselle en ce moment. Un de ces albums qui vous vrillent jusqu'au fond de l'âme. J'ai peur d'abîmer avec mes mots cette rencontre avec une oeuvre, par dessus le plan de la réalité, ces connexions filaires et magiques entre moi et l'invisible.
Il y avait bien longtemps que je n'avais pas autant aimé un disque de rock. Peut-être y suis je sensible parce que la musique est si ralentie, si étirée, si répétitive, si pensive, si contemplative, qu'elle n'a plus de rock que les instruments et le son. Earth est un groupe de métal, que parait-il Kurt Cobain avait mis en haut de son panthéon. Mais ça n'est pas ce qu'il faut chercher dans leur musique, le métal. Il est là qui hante derrière les guitares cristallines et les pianos lancinants, niché dans une petite saturation, un larsen prenant et continu toujours mixé très bas, logé dans des structures distendues et ralenties. Mais ca n'est pas lui qui surgit. C'est une douceur, une douceur sombre et un peu fielleuse qui me rappelle un autre album gigantesque, le "Spiderland" des Slint. Toujours ce couple extase/mélancolie. De la répétition forcée jusqu'au délicieux. Ne vous fourvoyez pas, il ne s'agit pas d'un disque de black métal tout en drones et en grincement de porte.
On y sent à l'oeuvre une chose qu'aucun groupe non métalleux n'aurait pu saisir, une douceur qui n'existe que par ce qu'elle est née d'une longue pratique de la brutalité. qui revient de loin. La beauté survient de ces saccades en slow motion, de ces blancs nés de structures rock ralenties, de ces breaks si sont longs et si trainants. Une beauté mélodique simple qui a poussé du champ de bataille comme une plante grimpante à la floraison un peu pâle. Earth flatte ma neurasthénie gothique, mon penchant à vouloir m'installer là à simplement écouter le sang qui passe dans mes artères. Le disque s'appelle "hibernaculum" et il est moins froid qu'on pourrait le croire. La mère nature finit toujours par s'éveiller. Même si c'est bien à son engourdissement que nous assistons fascinés et bercés par sa respiration qui va s'éteignant.