23 avril 2010

 

Onfray, Roudinesco et le point Godwin

Je n'ai jamais lu Onfray. Je m'y mettrais peut-être un jour, je n'en sais rien. Vu le métier qui est maintenant le mien ça ne serait pas inutile. Et puis le temps est peut-être venu parce que moi j'ai toujours eu du mal, sans trop savoir pourquoi, avec ce machin para-scientifique qu'on appelle la psychanalyse. Visiblement Onfray le considère ni plus ni moins que comme de la magie qui prend les atours de la raison. Ca m'a l'air bien son truc. Rien que ce principe de "l'analyse", ce nom, me semble une complète défaite. Ca me semble vouloir se vautrer dans soi, supprimer le plus possible ses connections au monde, se chosifier en un système... Comme je ne sais pas de quoi je parle, je n'irai donc pas plus loin que ces intuitions.

Ce qui est certain, hors le fond du débat, c'est que la vieille Roudinesco a immédiatement franchi le point Godwin.

Je cite wikipédia : La loi de Godwin provient d'un énoncé fait en 1990 par Mike Godwin relatif au réseau Usenet, ancêtre de l'Internet, et popularisée depuis sur la toile : « Plus une discussion en ligne dure longtemps, plus la probabilité d'y trouver une comparaison impliquant les nazis ou Hitler s'approche de 1[1]. » Dans un débat, atteindre le point Godwin revient à signifier à son interlocuteur qu'il vient de se discréditer en vérifiant la loi de Godwin.


La Roudinesco a directement traité Onfray de fasciste. La manoeuvre est tellement grossière que je m'en suis marré. Mais je comprends pourquoi Onfray se doit de réagir devant la presse. Ce genre d'arguments puants passent à tous les coups. C'est de la réduction ad hitlerium de bas-étage. Vous êtes contre Freud, vous êtes donc antisémite. Vous êtes contre la psychanalyse, vous êtes donc nazi. Il serait temps que les psychanalystes s'inventent un meilleur défenseur. Sinon ça risquerai fort de se retourner contre eux. Roudinesco phallangiste ! Moi aussi je vais la traiter de fasciste tiens ! Y'a pas d'raison !

Zizek le lacanien par exemple, pourrait-il répondre avec le sens du débat et de la dérision à Onfray ? Voilà qui serait-intéressant.


Nom de dieu j'ai commenté l'actualité. Deux fois en 4 ans je crois. Merde !


PS un truc quand même pour Monsieur Onfray. Karl Kraus qu'on ne peut pas soupçonner d'hitlerisme s'était aussi rangé du côté de Dolfuss, même après la répression contre les ouvriers. Kraus n'était pas un fasciste, même si les allemands le rangent dans cette boîte encore de nos jours (Jacques Bouveresse a écrit là-dessus). Il était probablement une sorte d'anarchiste total (de droite ?) très difficile à classer. Une grande source d'inspiration potentielle pour ceux qui s'intéressent à la critique de leur époque en tout cas (dans la bibli à côté de Walter B et Siegfried K !). Se ranger coté Dolfuss était pour lui la seule solution pour que l'Autriche ne cède pas aux sirènes de l'hitlérisme. Il s'est trompé dans les grandes largeurs. Peut-être Freud (avocatisons le diable) a-t-il fait une erreur similaire ?
Pour ce qui est de ses amitiés avec Mussolini, là je n'ai pas d'arguments, et ça me semble quand même montrer au moins un respect très moche pour les grands et les puissants. Si ce n'est pire, effectivement.

Comments:
Point de vue
Halte aux impostures de l'Histoire, par Guillaume Mazeau
LE MONDE | 21.04.10 | 14h25


Avant même sa parution, le dernier livre de Michel Onfray contre Freud fait déjà l'objet d'un violent débat. Beaucoup de bruit pour rien ? L'historienne de la psychanalyse Elisabeth Roudinesco n'exagère-t-elle pas en décrivant Onfray comme un usurpateur qui réhabilite les thèses de l'extrême droite ? Bien au contraire. Les dérives d'Onfray ne sont pas nouvelles. En 2009, il a publié une apologie de Charlotte Corday (La Religion du poignard. Eloge de Charlotte Corday, Galilée). Plutôt bien accueillie par les médias, cette histoire est pourtant historiquement médiocre et politiquement scandaleuse.

Dans ce brûlot truffé d'erreurs grossières, Onfray veut montrer que Charlotte Corday peut aujourd'hui inspirer ceux qui, lassés d'une gauche impuissante et rongée par les luttes fratricides, restent attachés à l'action et à la vertu. Marat, censé personnifier cette classe politique dévoyée, est stigmatisé comme un charlatan, un fou et un dictateur... Presque à chaque page, le lecteur se voit infliger les citations les plus haineuses, inventées de toutes pièces. Ainsi, Marat n'a jamais dit : "Je voudrais que tout le genre humain fût dans une bombe à laquelle je mettrais le feu pour la faire sauter" (p. 27)...

Non, les élites politiques de la Révolution n'étaient pas toutes corrompues. Non, les sans-culottes ne peuvent pas être décrits comme des sauvages. Onfray croit-il vraiment que le cannibalisme était une pratique fréquente sous la Révolution ? Comment peut-il réduire la Terreur à une immense giclée de sang due à des meurtriers en série comme Marat ou Sade (chap. 9) ? Surtout, jamais Charlotte Corday n'a été athée ni libertaire, mais une noble défendant une conception conservatrice des rapports sociaux et de la religion.

Affectant la posture du visionnaire incompris des élites parisiennes, Onfray balaye d'un revers de main les centaines de travaux scientifiques publiés depuis au moins quarante ans, qui contredisent ces caricatures. Michel Onfray se rend-il compte que presque tout ce qu'il dit ne provient d'aucune source, d'aucune archive, mais de mémoires ou d'écrits apocryphes pour la plupart publiés au XIXe siècle par l'historiographie catholique et royaliste ?

TRAVAIL DE SAPE

Ainsi, tout ce qu'il dit sur le procès et l'exécution de Corday est tiré des Mémoires de Sanson... en réalité écrits par le jeune Balzac à l'orée des années 1830 ! La plupart des anecdotes liées à la personnalité de l'assassin de Marat ont, quant à elles, été inventées un demi-siècle après les faits par Mme de Maromme... une fervente légitimiste !

Cette désinvolture vis-à-vis des sources réduit cet essai à ce qu'il est : une mauvaise paraphrase de la droite cléricale et monarchiste du XIXe siècle. Parmi tous les écrits sur Charlotte Corday, celui qui ressemble le plus à l'éloge d'Onfray est d'ailleurs la pièce de Drieu La Rochelle, jouée sous l'Occupation en zone libre et inspirée de cette même famille de pensée.

suite ... http://abonnes.lemonde.fr/opinions/article/2010/04/21/halte-aux-impostures-de-l-histoire-par-guillaume-mazeau_1340656_3232.html
 
Bonjour, c'est intéressant mais légèrement hors-sujet. Les erreurs possibles de monsieur Onfray sur Charlotte Corday ne valent pas erreurs sur Freud. Mais je note que vous ne l'avez pas traité de nazi vous au moins !
 
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