14 octobre 2009

 

Brel - Je suis un soir d'été


Je suis un soir d'été


D'abord le titre. Je suis un soir d'été. comme si le cours des choses avait conscience de lui même. comme si- manière de licence poétique ou de vision droguée - le monde se faisait conscience. L'un n'est pas dans l'autre. Ni l'inverse. C'est fondu, comme la voix la musique et les paroles, dans un entre tout. C'est la puissance du verbe coco... Le chanteur se place au dessus de tout, de tous. Ou plutôt entre. Il passe de l'un à l'autre et si j'ose dire les embrasse tous. La vidéo illustre ça très bien (d'une façon qui me semble assez "théâtre prolétarien" mais je n'y connais que dalle) : Brel nous parle de choses et de gens qui ne sont ni aimables, ni détestables. L'orangeade à la sous-préfecture, la famille prolo, l'air. Il se met à la place du vent, il est partout à la fois, il est l'Œil des choses. C'est un procédé littéraire probablement affublé d'un nom grec compliqué et aussi ancien que la grand-mère de Gilgamesh. Brel sait simplement y faire. Comme souvent dans ces tentatives d'entomologie un peu exaltée, d'objectivité mouillée dirais-je, affleurent des blessures, de la nostalgie et surtout quelque chose comme une clameur, celle de l'amour. Brel les aime tous et surtout toutes, les femelles maussades de fonctionnarisés, les dîneurs familiaux, les orangeades, les nappes qu'on secoue, ces vieux qui comme tous les vieux ont tout perdu. Succession de fulgurances nostalgiques comme des odeurs oubliées qui remontent à vos narines. Celle du porche de votre maison de vacances de quand vous étiez enfant. Et puis la Belgique bien sûr. De lourdes amoureuses aux odeurs de cuisines promènent leur poitrine sur les flancs de la Meuse...

La musique simplissime ouvre l'espace aux trémolos de sa voix. A son ostentation sentimentale - le texte pourrait être un compte rendu, il est une déclamation - qui adoube pour un peu la solennité innocente, la beauté insensée de cette torpeur lente des choses. Sentimentalité qui me semble bien figurer ce que le titre raconte : l'empathie, où conscience et émotions prennent la place de la trame du monde lui même. Brel est tout et tous. ou plutôt il est l'invisible le lien entre tous. Un lien amoureux. Ça me rappelle les discours de ma mère sur l'amour comme force physique entre les choses. Elle y croyait. Pensait qu'on le découvrirait un jour en laboratoire. Je les ai toujours trouvé horriblement décalés (ces discours) par rapport à la brutalité tant de la nature que de la société, mais en même temps j'ai toujours envié cette capacité à y croire... Amour - j'insiste sur ce mot qui me semble crucial - de la simplicité aussi. Un amour des gens, bien au delà de l'humanisme, plus au sens enfantin : un amour inconditionné. inconditionnel. Qui pour un peu n'a d'autre interlocuteur que lui même.
On ne se débarrasse jamais de là d'où l'on vient. L'éducation et le sein de la mère*. Ce sera ma conclusion à cette tentative d'exploration de mon amour déraisonné pour cette chanson.


* La patrie semble ajouter Brel. Ce qui depuis mon "exil" ne me laisse pas complètement indifférent.

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